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Colloque, 12-13 octobre 2017 à Lorient, Université Bretagne Sud
Appel à communications
Depuis quelques années, le paysage fait un retour en force en sciences humaines et sociales. Le paysage, ou plutôt les paysages, tant les formes mobilisées sont nombreuses, ne s’envisagent plus seulement à travers la vue, mais à travers l’ensemble des sens : l’ouïe, l’odorat, le toucher, le goût, l’ensemble du spectre sensible et sensitif interviennent désormais dans l’appréhension et la compréhension des paysagère.
Le paysage constitue un objet ancien pour l’ensemble des sciences humaines et sociales. La géographie l’a très tôt considéré comme son objet central, en l’approchant presque exclusivement par la vue : les yeux étant ainsi conçus comme les instruments du géographe de terrain. D’autres disciplines, telles l’histoire, l’histoire de l’art ou l’architecture, ont également mobilisé très tôt le paysage comme objet ou comme approche pour saisir les rapports matériels des hommes au monde. Cet engouement ne s’est pas démenti, mais a suivi les évolutions épistémologiques. Dans les années 1970-1980, le paysage a été considéré comme un moyen d’approcher les idéalités et les représentations immatérielles des hommes et des sociétés, dans une veine phénoménologique. Dans les années 1990, une vague historiographique s’est intéressée à cet objet transdisciplinaire, sous l’angle du paysage comme objet social et objet de demandes sociétales.
Jusqu’alors, les autres dimensions sensibles que la vue, qui est originairement le sens dominant dans l’approche paysagère, ont été peu considérées. Elles sont aujourd’hui au cœur d’un réinvestissement des paysages, comme objet d’étude, et conséquemment ouvrent ainsi à sa réévaluation, comme catégorie épistémique. Cette mobilisation récente des sens pour aborder les paysages traverse l’ensemble des sciences humaines et sociales et ne concerne d’ailleurs pas que la question du paysage. Parmi les multiples publications récentes, citons pour la géographie un numéro spécial de la revue Espace géographique sur le paysage chez John Brinckerhoff Jackson, un numéro de Emotion, Space and Society consacré à la place du son et des émotions en géographie, coordonné par Karolina Doughty, Michelle Duffy et Theresa Harada. En anthropologie, Philippe Descola illustre l’importance du paysage, notamment à travers son cours au collège de France (Les formes du paysage, cycle de leçons 2012-2014) et contribue à questionner la dimension transculturelle et transdisciplinaire du paysage : le décentrement du regard des sociétés occidentales vers d’autres civilisations permet ainsi d’envisager d’autres formes de perception paysagère. En histoire, le paysage sonore de l’Antiquité, méthodologie, historiographie, perspectives de S. Emerit, S. Perrot et A. Vincent interroge la notion de soundscape en histoire et ouvre des pistes stimulantes. En sociologie, de telles ouvertures de l’appréhension du paysage sont aussi à l’œuvre.
Il est remarquable de noter une convergence des différentes sciences humaines et sociales vers une appréhension multi-sensorielle des paysages. Certains sens semblent davantage représentés, en particulier l’ouïe et l’odorat, mais tous les sens sont peu à peu investis. Le paysage n’est donc plus seulement appréhendé par la vue, mais bien de manière pluri-sensorielle. L’expression « paysages sensoriels » s’impose d’ailleurs progressivement et signale le changement à l’œuvre dans l’ensemble des sciences humaines et sociales.
Cette ouverture au spectre sensoriel engage, comme corollaire, le questionnement de la catégorie même de paysage. En effet, en mobilisant les sens (ainsi que les émotions) pour comprendre le paysage et en considérant la dimension pluridisciplinaire de cette mobilisation, c’est la catégorie paysagère qui s’en trouve modifiée et réinterrogée. Comment peut-on définir le paysage à la lumière de l’approche sensorielle ? Comment qualifier les « paysages sensoriels » ? Une partie des interrogations concerne les lieux envisagés : les paysages sensoriels débordent-ils spatialement les paysages entendus au sens classique ? Pour le dire autrement, la mobilisation de tous les sens, dans la mesure où elle considère d’autres dimensions, n’engage-t-elle pas une dilatation des paysagères ? Comment dès lors envisager ces paysages d’un point de vue épistémologique ? Si l’ensemble des sciences humaines et sociales paraît s’entendre sur l’usage des sens pour appréhender les paysages, peut-on identifier alors des épistémés partagées du paysage/des paysages ? Le paysage peut-il donc servir au dialogue inter, voire trandisciplinaire ? Voici quelques-unes des questions que ce colloque souhaite soulever et discuter.

Axes de communication

L’objectif de ce colloque est triple.
D’une part, il s’agira de mettre en évidence les modalités méthodologiques, théoriques et pratiques de la mobilisation des paysages sensoriels dans les différentes sciences humaines et sociales. Comment les sciences humaines et sociales s’emparent-elles des sens pour envisager les paysages ? Comment aborder le paysage par l’ouïe, l’odorat, le toucher, la vue ou le goût ? Quels sens sont-ils mis en avant et quelle est leur balance, leur hiérarchie ? Quelles difficultés méthodologiques et théoriques existe-t-il à l’appréhension sensorielle des paysages ?
D’autre part, on envisagera les conséquences épistémologiques que cette mobilisation des paysages sensoriels entraîne. Comment la mobilisation des sens contribue à redéfinir la catégorie du paysage ? Comment cette mobilisation partagée par les sciences humaines et sociales participent d’une approche pluri- et/ou interdisciplinaire ?
Enfin, à ces deux approches plus théoriques pourront s’adjoindre des études de cas permettant de définir des paysages sensibles, avec des approches méthodologiques spécifiques à chaque science humaine ou sociale, offrant des éléments de réflexion et de comparaison.
Ces axes privilégiés ne sont bien sûr pas exclusifs, d’autres questionnements ou problématiques pourront être proposés.

Organisation du colloque

Le colloque se tiendra sur deux journées à l’Université Bretagne Sud à Lorient les 12 et 13 octobre 2017. Il sera organisé par sessions de communication de 20 à 30 minutes chacune. Un grand temps de discussion sera laissé libre après chaque session.

Modalités de proposition des communications

Les propositions présenteront en une page maximum l’objet de la communication, en précisant l’axe dans lequel s’inscrira l’intervention. Elles feront apparaître les nom, prénom, appartenance institutionnelle et adresse mail du ou des communicants, ainsi que quelques éléments bibliographiques.
Elles sont à envoyer à Véronique Mehl ou/et Laura Péaud avant le 10 mars 2017.
Les auteurs dont les communications seront acceptées seront avertis par mail début avril.

Véronique Mehl

Université Bretagne Sud
Laura Péaud
Université Grenoble Alpes

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